« Dans le spectacle, une
société de classes a voulu, très systématiquement, éliminer l'histoire. Et maintenant on prétend regretter ce seul résultat particulier de la
présence de tant d'immigrés, parce que la France "disparaît" ainsi ?
Comique. Elle disparaît pour bien d'autres causes et, plus ou moins rapidement,
sur presque tous les terrains.
Les immigrés ont le plus beau
droit pour vivre en France. Ils sont les représentants de la dépossession ; et la dépossession est
chez elle en France, tant elle y est majoritaire, et presque universelle. Les
immigrés ont perdu leur culture et leurs pays, très notoirement, sans pouvoir
en trouver d'autres. Et les Français sont dans le même cas, et à peine plus
secrètement.
Avec l'égalisation de toute
la planète dans la misère d'un environnement nouveau et d'une intelligence
purement mensongère de tout, les Français, qui ont accepté cela sans beaucoup
de révolte (sauf en 1968) sont malvenus à dire qu'ils ne se sentent plus chez
eux à cause des immigrés ! Ils ont
tout lieu de ne plus se sentir chez eux, c'est très vrai. C'est parce qu'il n'y
a plus personne d'autre, dans cet horrible nouveau monde de l'aliénation, que des immigrés.
Il vivra des gens sur la
surface de la Terre, et ici même, quand la France aura disparu. Le mélange
ethnique qui dominera est imprévisible, comme leurs cultures, leurs langues
mêmes. On peut affirmer que la question centrale, profondément qualitative,
sera celle-ci : ces peuples futurs auront-ils dominé, par une pratique
émancipée, la technique présente, qui
est globalement celle du simulacre et de la dépossession ? Ou, au contraire, seront-ils
dominés par elle d'une manière encore plus hiérarchique et esclavagiste
qu'aujourd'hui ? Il faut envisager le pire, et combattre pour le meilleur. La
France est assurément regrettable. Mais les regrets sont vains. »
(Guy Debord, Notes sur la « question des immigrés » -
des notes rédigées fin 1985, puis transmises à Mezioud Ouldamer, lequel publia,
l'année suivante, aux Éditions Gérard Lebovici, Le Cauchemar immigré dans la décomposition de la France. Mezioud
Ouldamer est mort le 12 juillet dernier).
Impeccable, implacable, le Guy.
RépondreSupprimerVous m'apprenez la disparition de Mezioud Ouldamer - son cauchemar immigré est difficile à se procurer quand on a pas un sou vaillant.
Salutations, le Moine
Un autre hommage à Mezioud Ouldamer est paru ici: http://acontretemps.org/spip.php?article639
RépondreSupprimerUn texte inédit, datant de juin 2016 devrait paraître bientôt sur le même site.
Amicalement