jeudi 31 janvier 2013

Tout simplement


                   

Avec ceci ?


« Je me suis rendu compte que j’avais pris de l’âge le jour où j’ai constaté que je passais plus de temps à discuter avec les pharmaciens qu’avec les patrons de bistrot. » (Michel Audiard) 


Marcelo Garcia, gentleman.

             

Au chef-d'oeuvre inconnu


Une pensée fraternelle - admirative - pour cette pléiade d'artistes contemporains exerçant, dès que possible, leur généreux talent partout dans le tréfonds obscur du vaste zoo capitaliste, et notamment en ce moment-même du côté d'Aulnay-sous-bois, en France. Rappelons que les esthètes en question consentent rarement à s'exposer de leur propre chef, la misérable valetaille universelle des huissiers, flics ou jaunes amenés un jour ou l'autre à les côtoyer s'occupant d'ordinaire fort bien de leurs intérêts. Ne parle-t-on point, d'ailleurs, de commissaires d'exposition ?





mercredi 30 janvier 2013

Comme le temps passe...


        « Encore un siècle de lecteurs et l'esprit lui-même puera ! » ( Friedrich Nietzsche )


Méfiance !


lundi 28 janvier 2013

Cinq fruits et légumes par jour


« L’ordre social existant est un scandale à suffoquer la Nature. »

Jules Laforgue, Moralités légendaires.


vendredi 25 janvier 2013

Derniers jours à base de popopopo...


Derniers jours pour aller revoir les images du pogrom de 1934 à Constantine, et celles des arrivées de Drumont ou Rochefort à Alger, derniers jours pour aller écouter Reinette l'Oranaise, Lili Boniche, Blond Blond, Line Monty et Youssef Hagège (et pleurer), derniers jours pour aller reluquer Alphonse Halimi en short, la gueule éclatée oui mais putain, champion du monde ! Derniers jours pour saluer la Kahina, juive berbère insurgée, derniers jours pour aller saisir tout le ressentiment des Arabes algériens, que le décret Crémieux ne concernait pas, et pourquoi donc ? Derniers jours pour tenter de résoudre cet épineux problème, de savoir qui aura le plus détesté les Juifs, dans le monde ? Les chrétiens, avant et après 1492 ? Les musulmans du onzième siècle ou du vingtième ? Les Juifs eux mêmes, tous seuls comme des grands ? Les Chinois ? Les Chinois, à ce qu'il semble, se sont toujours pas mal foutus des Juifs. S'ils ont un problème de pays qui leur manque, je crois qu'il nous reste un peu de place dans la banlieue de Pékin, plaisanta un jour le stalinien Mao-Tsé-Toung. Voilà, entre autres choses, pourquoi les Chinois nous furent toujours sympathiques. Juifs et Chinois, éternels vomis et proscrits du monde, accusés de corrompre le sang en silence, minorité nocive, ou de prétendre au contraire déferler un sale matin, et de nous avoir alors à la masse et au nombre. Derniers jours pour comprendre comment ce rapport d'obligé - ponctuel et historique - à la chiennerie d'argent (rapport qu'un oppresseur imposa jadis, prohibant chez le Juif tout désir de vouloir vivre de quelque autre manière que ce soit, où que ce soit d'autre que dans les sordides environs de l'argent, du fait qu'un gars se serait vu, voilà longtemps, cloué sur un bout de bois en forme de croix, par la faute d'un aïeul de la petite fille en bas à droite de l'affiche ci-dessus) se sera transformé à la longue en confusion nécessaire, dans les cervelles. Derniers jours pour se demander, une fois encore, si la révolution algérienne aura vraiment merdé dès le départ. Derniers jours pour s'atterrer, une fois encore, de l'assassinat en 1961 du grand musicien Cheick Raymond Leiris, Algérien.


                            

mercredi 23 janvier 2013

Riche Belgique (1) Anvers et contre tous




Si vous passez prochainement par Anvers, sachez que le Musée Royal des Beaux-Arts de cette ville, en réfection, demeurera fermé en principe jusqu’en 2017. Une partie non-négligeable des collections qu’il abrite se trouve de fait dispersée entre une poignée d’autres sites, guère éloignés les uns des autres. Pour ce qui concerne la ville d’Anvers même, ces sites sont au nombre de trois : il est possible, d’abord, d’admirer quelques merveilles dans le sein de la cathédrale Notre-Dame, laquelle regorge déjà – lesdites merveilles mises à part – de la beauté la plus ardente, toute froidement gothique brabançonne qu’elle soit. Sa chaire de vérité, par exemple, taillée dans le chêne fut pour nous un complet bouleversement. Nulle part ailleurs (sauf peut-être, voilà quelques années – « Crénom ! » – dans l’église Saint-Loup de Namur) le travail du bois clérical n’avait suscité en nous semblable puissance d’euphorie. C’est que la poussée de l’arbre s’y fait absolument irrésistible, dominant les deux escaliers cernés de brunes racines incandescentes.Tout ici devient cambium, jusqu’aux feuilles, jusqu’aux riches fruits portés par ces somptueuses et noueuses ramures, jusqu’aux oiseaux mêmes accompagnant cette divine montée. Et les reflets se jouant partout (sur le pli vernis, surtout, des voiles et tentures écartées par les séraphins dominant la chaire) déchaînent la volupté, sur le même mode gourmand que le céladon de certains vases chinois, identiquement pâteux, crémeux et sublimes. Du chocolat pour les yeux. Ainsi nous apparaît cette œuvre incroyable de Michel Van der Voort.

Rappelons la présence également séculaire, en ces lieux, de deux œuvres violemment homosexuelles de Rubens, suffisant assez à infirmer, du moins à nuancer cette réputation de simple charcutier flamand qui lui fut souvent faite par certains esthètes décadents, Des Esseintes en tête. Nous parlons de sa très célèbre Érection de la Croix (qui porte, comme suggéré déjà, fort bien son nom) et de son Saint-Christophe, dont le protagoniste – sensiblement musculeux – représente après tout, souvenons-nous en bien, chargé qu’il est de l’énorme poids des péchés du Monde assumé par un Christ négligemment juché entre son épaule et sa nuque, une survivance de l’ère païenne, demeurée adorée en dépit de sa mise à l’index officielle (même remarque que pour l’Érection précédente) par la catholicité de base (la coquine). Le statut théologique particulier de Saint-Christophe aurait-il cependant quelque chose à voir avec ce fait notable que l’œuvre de Rubens se trouve scandaleusement mal exposée (pour tout dire franchement dissimulée) dans un coin obscur de la cathédrale Notre-Dame ? 

Comment croire à une fable pareille...




                                                                
Mais venons-en aux nouveautés issues de notre Musée des Beaux-Arts. De notre point de vue tout à la fois ignare et sévère, parmi celles-ci, il n’en est que deux qui soient authentiquement sidérantes. Elles sidèrent, d’ailleurs, pour une même raison de fond touchant à leurs comparables cruauté et sadisme. La déploration du Christ, en premier lieu, de Quentin Metsys – le plus renommé des peintres anversois du début du 16ème siècle – est un travail de commande exécuté à la demande de la Guilde des Menuisiers de sa ville. Le retable égale pour nous en brutalité, tout en le dépassant dans la goguenardise et le vice (bref, la subtilité) sur son volet de droite, une horreur telle que le Jugement de Cambyse de Gérard David, datant à peu près de la même époque (1498) et visible, quant à elle, au Musée Groeninge de Bruges (ou sur le site, il fallait s’y attendre, des inquiétantes – et tout aussi flamandes – Âmes d’Atala). Le tableau de Metsys nous montre un Christ soumis à la torture d’êtres dont le pharisaïsme et la romanité paraîtraient toutes deux également douteuses, et qu’on jugerait plutôt, à la vérité, parés d’une physionomie approchant celle de quelque lumpenprolétaire local, appréciant de jouer du couteau ou de tout autre instrument tranchant ou contondant disponible, adepte convaincu, enfin, des thèses les plus vigoureuses du Vlaams Belang (fort influent dans le coin : veillez d’ailleurs, si vous vous sentez encore visité, de loin en loin, par quelque vague réminiscence de juvénile gauchisme – surtout en pleine journée – à ne point vous rendre trop vite après la visite de la cathédrale, par inadvertance assoiffée, dans certain estaminet léonin proche de la Grote Markt. Sous peine de subir peut-être, à votre tour, le terrible calvaire imposé ici à Notre Seigneur).



 
Toujours est-il que voilà Jesus-Christ plongé dans un chaudron bouillant, et assailli de toutes parts par des nervis équipés, et lui souhaitant, trognes étonnantes et enthousiastes à l’appui, tout le mal possible et imaginable. Détail piquant (si l’on osait ce terme déplacé), un coup d’œil jeté furtivement sur le bas-ventre du tortionnaire de gauche révèle chez lui une monstrueuse gaule déformante (une seconde érection de la croix, en quelque sorte, oui, vous avez raison). Le misérable se trouve tout ému de fignoler sa besogne. Et l’animalité, de partout, se trouve saillir hors de lui. Notons que Philippe II d’Espagne, l’un des plus grands djihadistes de l’Histoire, qui laissa, avec son fidèle et sympathique lieutenant le duc d’Albe les bons souvenirs que l’on sait en Flandre, voulut (sans succès) se porter acquéreur de ce tableau, ce qui est tout dire. Sans doute l’eût-il contemplé ad nauseam, les soirs d’hiver, en mijotant de nouvelles techniques de soupe à l’hérétique. Et puisque nous causons Inquisition et autres « Tribunaux du sang », rappelons que de telles horreurs se trouvent cette fois dénoncées, révélées en leur complète folie, par une autre merveilleuse œuvre, de Brueghel celle-là, nommée Margot l’Enragée, qu’il est possible d’admirer dans l’ancien logement du collectionneur anversois Mayer Van den Bergh, devenu un musée. Cet homme aura, à lui seul ou presque (voir un peu plus loin) fait redécouvrir à son pays, à l’aube du vingtième siècle, le génie (et parfois jusqu’aux nom et généalogie exacts) de peintres flamands souvent complètement inconnus ou méprisés de son temps. Dans ce même musée, un Saint-Érasme torturé, dont les intestins se trouvent exhibés et spectaculairement embobinés sur une roue de bois, fait aussi son petit effet.




Revenons à Notre-Dame. Le Second tableau exceptionnel, que l’on découvre en réalité en premier en entrant dans la cathédrale, et en la parcourant comme il convient, c’est-à-dire de gauche à droite (non que nous entendissions par là, rassurez-vous, que la droite indique la nécessaire direction de l’Histoire), est celui – un peu plus tardif que le précédent (1554) – de Frans Floris, intitulé Le combat des anges rebelles. Floris représenta longtemps, aux yeux de la xénophobie artistique anversoise spécialisée, une sorte de traître, de cinquième colonne italianisante minant la pureté joyeuse de l’art flamand authentique. C’était encore le cas au moment (1902) de la fameuse exposition de Bruges consacrant en fanfare la « redécouverte » nationaliste des vrais maîtres locaux (dont Brueghel, encore lui) s’étant soi-disant glorieusement préservés, eux, de toute souillure de race ou de goût. Précisons qu’à la même époque, pour la même raison, le terme de « primitifs flamands », jugé péjoratif car/et d’origine française, se trouvait systématiquement écarté. Ainsi donc, la manière de Floris serait italienne et son Combat des anges rebelles évoquerait le Jugement dernier de Michel-Ange. Soit. Les monstres de Floris ressemblent en tous cas à ceux du brugeois Pieter Pourbus, par exemple, qui s’inspira pour sa part sans aucun doute (et tout « dernier primitif flamand » qu’il était, d’ailleurs) de l’œuvre de Michel-Ange (auquel il emprunta jusqu’à son titre : Le Jugement dernier). Quelle œuvre sublime que celle de Floris ! dont, cette fois, la réalisation fut commandée à son auteur par la Corporation des Escrimeurs, d’où la tonalité spécialement martiale de l’ensemble. L’Archange Michel, épaulé de ses légions célestes, s’y affronte à des forces du Mal formant un indicible magma de chairs, soumises aux transmutations les plus effrayantes. Un monstre arbore un chef de sanglier, son pénis, lui, se voit « intercepté » (comme dirait Lautréamont) par une tête de rapace, qui s’ouvre en laissant poindre un bout de langue rougeoyante, tandis qu’au bout de son pied, un ongle a poussé, griffu, formant une arme redoutable. Ailleurs, des figures de singes horribles et de félins dégénérés, et galeux, à cheveux méduséens s’imposent à des corps splendides, au dos desquels des queues s’agitent, serpentines, la gueule avide de mordre, ou plutôt de tournoyer inutilement dans le vide, avec lascivité. Le chaos est maximal. De même, l’évocation et le dynamisme, les monstres semblant pourtant ici moins déterminés à lutter contre les anges (lesquels constituent, à vrai dire, des cohortes à peine plus disciplinées) qu’à s’observer les uns les autres, de frère à frère, figés pour l’éternité dans l’ahurissement imbécile, écrasés par le sort, condamnés impuissants (et émouvants) aux regrets infinis.




Après cette débauche de cruauté et de beauté lumineuses, oserons-nous avouer que la fine fleur de ce que l’on a désormais coutume d’appeler « l’expressionnisme flamand », emmené par sa figure majeure – Constant Permeke – nous parut bien sombre, pauvre, peu digne d’intérêt, tant dans ses manières, coloris et textures que dans ses thèmes, désespérément adhérents à une dure réalité paysanne, dont la monochromie reflète certes parfaitement la répétitive glauquerie. De ce point de vue-là, nous dira-t-on, le but aura été atteint. Nous en convenons volontiers. Nous  préciserons juste que la sélection de la quarantaine d’œuvres liées à ce courant moderniste, toujours issues, d’ailleurs, de la dispersion opérée par ce très fermé Musée Royal des Beaux-Arts, ne nous aura retenus qu’une grosse demi-heure. Quelques-unes suscitent tout de même l’intérêt : Azuur et Les buveuses de liqueur de Gustav Van de Woestyne, ainsi que les productions de deux autres gantois, les gravures de Gustave de Smet (Le paysan, voir ci-dessous) et surtout du génial – et d’ailleurs communiste – Franz Masereel, qui nous subjugue depuis longtemps, mais dont on ne peut ici admirer que deux choses : un Nocturne, et surtout le redoutable Prophète, celui, en l’occurrence (nous sommes en 1937) de la future grande boucherie internationale qui s’avance. Tout cela est observable jusqu’au 24 février prochain, à la Konigin Fabiolazaal d’Anvers, non loin de la gare, elle-même fort impressionnant édifice Art Nouveau.


Tout autre chose, maintenant, en un tout autre lieu. Dominant les bassins du port de plaisance d’Anvers, au Nord en suivant l’Escaut, à une portée de jet de pierre du quartier chaud où les demoiselles damnées par le sort travaillent en vitrine, s’élève le MAS (Museum Aan de Stroom) qui héberge lui aussi des chefs d’œuvres en vadrouille. Une exposition y est organisée, ayant pour nom Cinq siècles d’images à Anvers, dont l’intérêt principal, pour ne pas dire unique, est d’offrir aux jouissances de l’œil certains joyaux (une poignée) du passé. Non que nous n’approuvions pas cette frénésie désormais systématique, dans les musées du monde, de prétendre tout mettre en rapport, non que nous la défendions. Nous nous en foutons royalement, voilà tout. L’idée ne nous gêne point de disposer dans une même pièce un ramassis de pièces (justement) de monnaie de tous âges, le tableau de Jean Fouquet que nous allons bientôt évoquer, et enfin le produit d’élucubrations contemporaines quelconques visant à démontrer que « oui, décidément, aujourd’hui tout est image, et même communication et même que c’est la société du spectacle, et qu’il faut bien comprendre ça pour pouvoir en jouir au mieux et donc savoir se vendre tout en faisant mine d’être vaguement critique et pas dupe – pas con – pour pouvoir gagner sur tous les tableaux, comme une grosse ordure d’artiste intéressé plus que quiconque à la préservation de cette société de merde. »

Cela ne nous gêne point, ou plus. Pourvu que nous puissions profiter, quelques instants, avant l’irruption sacrilège de quelque famille (à poussette), de cette incroyable Vierge à l’Enfant entourée de séraphins et de chérubins dont nous nous approchons maintenant. Que voyons-nous là ? D’abord, il faut bien le dire, c’est un sein que nous voyons, qui nous crève même les yeux, de blancheur et de rotondité phénoménales. Tout ici respire le sexe : la poitrine explosive de la Vierge, destinée à nourrir un Christ aux allures de vieillard parvenant toujours à bander, ou tout au moins rougir, à l’occasion, et puis la taille de la suprême Dame, sa finesse corsetée contrastant avec l’opulence de gorge sus-mentionnée. La blancheur du drap et celle du bébé sont ainsi que celle du sein ou du drap, d’acier ou bien de foutre : cette blancheur est en tout cas d’une violence lactée (et on parlerait pour nous à bon droit de cette œuvre en évoquant une arme blanche). Autour du trône volètent des anges, de couleur rouge ou bleue, certains touchant le trône ou s’en tenant plus près que les autres. Force est de constater que ce sont bien les rouges qui emportent le morceau, en termes de proximité. Quoi de plus normal : ceux-ci symbolisent, nous dit-on, la passion amoureuse et le feu. Autrement dit, ils ont plus faim que les autres, les bleus, lesquels renvoient, eux, aux notions de pureté et de plénitude azurée. Grand bien leur fasse. Notons la texture presque élastique, pneumatique jusque dans ses brillances et tensions, du corps du premier séraphin, en bas à gauche. Notons le reflet blanchissant le haut de sa fesse droite. Puis respirons un peu. Jean Fouquet, peintre à la cour de Charles VII et dont nous connaissons – outre un  portrait fameux du roi en question – les miniatures exécutées pour les Grandes Chroniques de France, employa comme modèle de cette Vierge à l’Enfant la célèbre maîtresse préférée de Charles VII – de vingt ans sa cadette – Agnès Sorel, remarquée par le souverain lors d’un tournoi parmi la suite d’Isabelle d’Anjou, et qui devait le rendre, selon moult témoignages de l’époque, le plus heureux des hommes. Serait-ce alors pas lui que notre Vierge nourrit ici, qu’elle fait revenir en première enfance, repu de lait, comblé, les yeux chassieux, sur le point de roter d’aise, avant pourquoi pas ! de s’endormir dans la satiété de l’amour ?




Cette question nous agitait encore, quelques pas plus loin, au moment de contempler la Vénus Froide (Venus Frigida) de Rubens, une des rares œuvres que l’artiste ait signées et datées, preuve qu’elle lui tenait particulièrement à cœur. Là, rien n’y fait. Ni les taquineries du satyre, ni les doux picotements d’amour ne pourront lutter victorieusement contre l’ennui mortel – immortel – de la déesse. La seule morsure qui vaille, hélas ! est plutôt celle du froid, qui fait grelotter ensemble Cupidon et sa maîtresse, le dos perclus de frissons.


Eh mais ! nous direz-vous, comment un sort pareil peut-il être fait à Vénus elle-même, comment semblable refroidissement pourrait-il survenir ? Il y faut soit l’acharnement patient de toute une vie conjugale défaillante, soit une parole, un geste malheureux ayant le pouvoir de couper la chique, soudain, aux plus déterminé(e)s des licencieux(ses). Vous allez comprendre. Faisons encore quelques pas dans les couloirs de ce MAS décidément édifiant. Nous voilà devant une autre toile, œuvre d’Abraham Janssens, intitulée Scaldis et Antverpia. La première impression qu’elle nous fit fut purement érotique. Un homme aux formes appétissantes et offertes y brandit sous le nez d’une donzelle au regard intéressé un généreux régime de fruits, appel, pensions-nous naïvement, au plaisir de l’opulence partagée. Surtout que la fille, quant à elle, semble désigner de l’index un certain point du corps du sybarite, situé approximativement autour de son nombril ou à l’approche de cette boule molletonnée que dessinent ses muscles abdominaux, vaguement contractés. Les fruits courbes et oblongs d’un côté, le bas-ventre charnu de l’autre : la chose nous semblait entendue. Après tout, nous sommes en Flandre, terre de paillarde liberté, de « dimanche de la vie » et autres pléiades de qualités bien connues. Qu’on juge alors de l’effet aussitôt produit sur notre enthousiasme par cette description aperçue de l’œuvre, dans quelque guide explicatif local :

« Afin d’inspirer les négociateurs des Provinces-Unies et des Pays-Bas espagnols, les autorités de la ville d’Anvers commandèrent au peintre Abraham Jenssens une allégorie politique pour l’hôtel de Ville. Scaldis, le fleuve divinisé, remet à Antverpia, une vierge personnifiant la cité, une corne d’abondance. L’œuvre rappelait aux diplomates présents leur écrasante responsabilité : Anvers devait en effet sa prospérité à l’Escaut ! Le 9 avril 1609, c’est sous la peinture de Janssens qu’ils signèrent la Trêve de Douze Ans. Grâce à cet accord, l’Escaut fut rouvert à la navigation. »


Après réflexion, nous nous résolûmes à considérer cette sinistre explication comme hautement plausible et, du même coup, meurtris autant dans nos désirs que dans nos prétentions herméneutiques, nous décidâmes à l’instant de quitter l’enceinte de ce MAS tellement cruel à notre endroit. Sous la pluie, bien sûr, car la vie est une chienne et le climat belge occidental, souvent extrêmement ingrat.





Pour terminer sur une note de cynisme et d’ultra-violence, nous vous suggérons également d’effectuer une visite au Musée de la Photographie d’Anvers, lequel accueille au moins jusqu’au 27 janvier 2013 (encore quelques jours, donc) deux expositions intéressantes : d’abord celle consacrée à Weegee (surnom d’Arthur Fellig), mythique (pour ceux que cela mite) paparazzo new-yorkais habitué des règlements de compte mafieux, des scènes de crime et policières hardcore ou encore des choses vues à portée sociale, tels ces rassemblements de foules immenses sur les plages de Coney Island dans les années 1940. Le bonhomme vivait dans un taudis, avec ses photographies. Guère sympathique et un modèle d’opportunisme, ce type, mais son talent de faiseur, son œil et sa débrouillardise goguenarde forcent tout de même le respect. Weegee avait installé un labo mobile dans le coffre de sa voiture, afin de développer sur le champ les clichés morbides effectués parfois quelques secondes après le meurtre (ou l’accident), souvent avant même l’arrivée des flics, sur la fréquence desquels notre obsédé était par ailleurs branché jour et nuit. Un autre aspect passionnant de ce type de travail est également dévoilé par l’exposition, concernant la pratique systématique de retouche photographique, parfois incroyablement grossière, exigée une fois sur deux par les titres de presse auxquels Weegee collaborait, ce dernier s’exécutant évidemment sans coup férir, supprimant là un cadavre ficelé dans une malle, ajoutant ailleurs des traces de sang au mercurochrome, etc. Le KGB n’a bien entendu jamais conservé le monopole photoshopique du mensonge historique.




L’autre artiste dont il sera ici possible de découvrir le travail est Gert Jochems, qui est entré en contact, par le biais de réseaux spécialisés, avec des adeptes intègres de sado-masochisme (réduction en esclavage, étouffement, latex, fétichisme) pratiquant leurs recherches érotiques au quotidien, fort normalement, en pays flamand. Ces gens ont ouvert leur porte à Gert Jochems et lui ont montré des choses avec une  confondante tranquillité. Certains parleront d’intrusion ou de voyeurisme. Pourquoi pas. Ce qui intéresse ici, c’est précisément la normalité des décors (souvent des intérieurs flamands de paysans ou autres pauvres ordinaires). Le monstre, derrière la porte, c’est monsieur tout le monde. La normalité implique le désir de meurtre érotique. Lenvie inavouable est universellement partagée. Tout cela n’est pas inutile à rappeler dans un monde pour qui, désormais, la sexualité des enfants serait largement une hypothèse de pervers (à traquer et enfermer) et qui oublie facilement (nous ne l’avons jamais oublié) que le tueur en série Émile Louis, par exemple, qui se livrait, avant d’ouvrir au coutelas le ventre de ses victimes, attachées à un arbre, à toutes sortes de danses archaïques cérémonielles (qui devaient bien remonter en lui, de quelque part obscure) était, au plan sociologique, un employé communal tout ce qu’il y a de plus conservateur et beauf, adhérent sans histoires de la CGT locale, bien apprécié de ses voisins. La vérité est derrière la porte. Et le plus clairement nous parlerons d’elle, çà et là, le moins durement la vérité sera tentée de se venger de nous.  












mardi 22 janvier 2013

Monique Morelli chante Mac Orlan (et le monde prend vie)

                  

lundi 21 janvier 2013

Concept

« Disons que j’ai des idées de concept...» 
Patrick Zelnick, possible repreneur du Virgin Megastore, Paris, 18  
janvier 2013.

Idée de concept managériale (work in progress)
 



   

samedi 19 janvier 2013

Jeff Monson, Black Flag


mercredi 16 janvier 2013

Invaincu


« What though the field be lost ?
All is not lost ; the unconquerable Will,
And study of revenge, immortal hate,
And courage never to submit or yield :
And what is else not to be overcome ? »


« Qu’importe une défaite ?
Tout n’est pas perdu ; la Volonté indomptable,
La revanche étudiée, la haine immortelle,
Le courage de ne se soumettre jamais,
Qu’est-ce autre chose que rester invaincu ? »

Milton, Le Paradis perdu.

mardi 15 janvier 2013

Urbanisme et Démocratie


« J’étais avec mon ami corse 
Jean-Pierre Santoni, nous respirions l’anarchie
Pour autrui, notre langage était du morse
Nous allions boire au bistrot " Les cinq billards "
De la vieille rue mouffetard
Où déjà, se mourait, le Paris fêtard
C’était encore, en 1973, lieu des soûlards
C’est aussi là, que fut arrêté
Le fameux poète psychogéographe feu Ivan Chtcheglov
En 1959, pour colère d’ivrogne et débris divers
De notre illustre récipiendaire
Ou alors, pour à la dynamite, et non au cocktail Molotov
Fit le projet, avec Henry de Béarn, de faire sauter la tour Eiffel
Car sa lumière le gênait, de quoi elle se mêle ! »

Le Corbillard de Ivan Chtcheglov (extrait), Patrice Faubert, 2012.  

  
Précision du Moine Bleu : Ivan Chtcheglov (Gilles Ivain) décide en 1950, avec son compagnon Henry de Béarn, de détruire la Tour Eiffel, dont l’éclairage lumineux - selon leurs premières (et dernières) déclarations - « les gênait pour dormir, la nuit ». Après s’être, lui ou un autre, procuré les explosifs censément nécessaires à l’accomplissement de ce projet notoirement avorté (la Tour Eiffel est, semble-t-il, toujours là), Chtcheglov laissera le temps sécouler quelque peu. Puis, en 1959, il sera appréhendé au café Les cinq billards évoqué par Faubert dans le poème ci-dessus, et déporté dans un asile psychiatrique où on lui fera passer à coups de tortures diverses, durant cinq ans, le goût de se mêler d’urbanisme, ou de laisser libre cours à toute autre expression de son génie. Ce martyre conserve aujourdhui encore, aux yeux de certaines personnes, une dimension mythologique.


lundi 14 janvier 2013

L'alcoolisme au Sénat



Dans un poème de 1872, Arthur Rimbaud recouvre de ses objurgations décisives une certaine composante de la société française d’alors. 
« Industriels, écrit Rimbaud, princes, sénats, périssez ! » 
Notez l’extrême sobriété première du ton, contrastant quelque peu avec la suite : 
« Le sang ! le sang ! la flamme d’or ! Tout à la guerre, à la vengeance, à la terreur »
Décidément, la chose fleure bon l’anti-parlementarisme-de-bas-étage-faisant-le-jeu-du Front-National (lequel devait forcément exister à l’époque, sous une forme ou une autre, et présenter le même usage qu’aujourd’hui de repoussoir symbolique quelconque. Mais nous avouons humblement ici n’avoir point vérifié ce trop fastidieux détail de l’histoire).
Rimbaud se verrait en tous les cas, de nos jours, pour des textes pareils, certainement taxé de populisme crasse. Voire même de terrorisme puisqu’il appelle un peu plus loin dans le même poème, à la disparition, rien que ça ! de trois continents à rayer de la carte, savoir : l’Europe, l’Asie et l’Amérique… Le onze septembre n’est pas bien loin, hein ! que dites-vous de cela ? Bien entendu, on ne l’enfermerait pas forcément pour longtemps : quelques semaines, tout au plus, devraient suffire, dans un Centre Éducatif Fermé de Charleville, où un sous-Vincent Peillon de (mauvaise) rencontre viendrait lui enseigner avec normalité les bases de la citoyenneté qui rend libre. Et on l’exhorterait publiquement aussi, c’est probable, en liberté, dehors, dans les colonnes d’un Libération quelconque (parce que Rimbaud se serait sans doute enflammé contre l’ignoble sort quotidien austéritaire imposé à l’Espagne, la Grèce ou à la France) à la responsabilité, au devoir citoyen de pourlécher jusqu’à étouffement la plante des pieds puante de tous les sociaux-libéraux réducteurs de dette du monde.
On se méprendrait, cependant, sur le contenu du petit opuscule présenté ci-dessus et publié, comme on peut le lire sur sa première de couverture, en Juillet 1887. Non ! les sénateurs ne semblent pas avoir suivi à la lettre l’ordre du poète, émis à leur endroit quinze ans auparavant. Selon nos informations, ils ne se sont d’ailleurs toujours point autodétruits, fût-ce au moyen de l’alcool, ce poison, certes terrible, mais qui tue, c’est bien connu, plus lentement que les autres. 
L’alcoolisme au Sénat consiste en réalité en une communication de quelques pages, adressée par un pittoresque défenseur du lobby bistrotier de l’époque à quelque ponte de la représentation patronale française. Le rédacteur s’y inquiète des discussions agitant alors le Sénat, à l’initiative d’un certain M. Claude (l’expression « des Vosges » accompagnant chaque apparition de ce patronyme, sans qu’il s’agisse nécessairement d’une stigmatisation fourbe de crétinisme prétendu) au sujet de l’alcoolisme présenté comme un fléau national rongeant davantage la nation d’année en année.
M. Limousin, notre brave lobbyiste, ne nie pas que l’alcoolisme soit un terrible mal, mais tout l’enjeu de son libelle est de dissocier le phénomène alcoolique en question (dont M. Limousin commence tout de même par nier qu’il soit en hausse, en s’aidant de moult statistiques passionnantes) et le nombre objectif de débits de boissons sur le territoire (dont M. Limousin s’acharne à prouver soit qu’il est en baisse, soit de toute façon que le réduire de manière répressive – et attentatoire à la liberté du commerce –  ne saurait freiner l’alcoolisme de masse). En quelques interventions assez vigoureuses, il en vient vite à défendre la légitimité citoyenne du bistrot, présenté comme un lieu de plaisir et de sociabilité, quand l’alcoolisme authentique et ravageur témoignerait davantage, selon lui, de comportements solitaires, de replis sur soi pathologiques. De sorte, bien entendu, que fermer un café reviendrait en réalité à créer un, dix, trente foyers nouveaux de ce mal que l’on prétendait combattre :
« Si le cabaret est un mal en tant que débit de boissons excitantes, il est, d’autre part, un bien, une nécessité sociale en tant que lieu de réunion. Je n’entends point par « lieu de réunion » seulement des endroits où l’on tient des assemblées, mais aussi, mais principalement les endroits où deux, trois ou quatre personnes peuvent se rencontrer pour causer et se distraire en commun. On dit que l’homme est un animal sociable, ce qui signifie qu’il a souvent et presque constamment besoin de la société de ses semblables. Or, où peut-il les rencontrer, ses semblables, si ce n’est dans une maison ouverte à tout-venant [sic], où l’on puisse s’asseoir pour causer, et où l’on trouve ce qui est nécessaire à la distraction ? » (L’alcoolisme au Sénat, p. 14).
Et plus loin :
« Or, une réglementation nouvelle des cabarets, qui ne pourrait avoir d’autre but que d’en restreindre le nombre, diminuerait les facilités de réunion, c’est-à-dire la vie sociale, mais n’atténuerait pas l’ivrognerie alcoolique. Ceux que domine cette passion feraient un peu plus de chemin pour la satisfaire (…) Et puis, il y a l’inconvénient politique, qui peut aller jusqu’à la restriction de la liberté de réunion. » (ibid, p. 15).
Ce que  le bon M. Limousin propose, au fond, « c’est la création de lieux de réunion qui ne soient pas des cabarets, qui, même, fassent concurrence aux cabarets. Ces lieux de réunion, ce sont les cercles, où des hommes de même condition se réunissent pour causer et se distraire, où ils boivent même des excitants, – puisque c’est indispensable, – mais d’où tout ivrogne habituel, tout homme de mauvaises mœurs est exclu ; où l’on joue, mais où l’on ne joue pas de l’argent : où on lit des journaux, des revues, des livres ; où l’on chante, où se réunissent les sociétés de jeunes gens faisant des exercices de gymnastique, des excursions, etc. Voilà le remède au cabaret, – qu’on ne supprimera jamais entièrement d’ailleurs, – voilà le moyen qu’aurait dû proposer M. Claude (des Vosges), pour lequel il aurait dû faire appel au concours de tous les philanthropes et à l’appui gouvernemental. » (ibid, p.16).
Résumons-nous. Nous voilà en présence d’un noble sénateur, d’abord, adversaire farouche de l’alcoolisme ordinaire, confronté, deuxièmement, aux assauts inspirés d’un utopiste délicat, imaginant à l’ombre de sa structure patronale tutélaire, la création de véritables « Arcadies » spirituelles – et spiritueuses – dont la floraison suffirait, à l’en croire, à rendre leur joie de vivre aux masses.
Tout cela prêterait bien sûr à ricaner, et certes nous ricanons, hé ! hé ! hé !
Mais cette courte lecture ne laisse, également, de nous interroger. Car lorsque, voilà quelques années maintenant, les bar-tabacs et autres lieux de convivialité et fraternisation semblablement notoires tels que les boîtes de nuit ou restaurants de notre beau pays de France passèrent, du jour au lendemain, sur décision gouvernementale, en « mode non-fumeur », certaines réflexions assez voisines de celles qu’on vient de présenter surgirent alors parmi la population, y compris il faut le dire – au sein de celle-ci – de la part de fractions que MM. Guéant, Alliot-Marie ou Ayrault qualifient volontiers, à l’occasion, des plus menaçantes, radicales et, pourquoi pas ! terroristes en puissance agissant de nos jours dans l’Hexagone.
Il nous souvient, par exemple, d’un ouvrage – un petit ouvrage, lui aussi, comme l’adresse de M. Limousin – paru fin 2003 chez l’éditeur libertaire L’Insomniaque, intitulé La blonde, la brune et les truands. On pouvait, par exemple, y lire sous la plume de son auteur (une certaine Carmen Nicot) les passages suivants, assez révélateurs :
« Et le paquet de clopes à 30 balles, c’est encore moins de coups au bar avec les potes et encore plus de nouilles à la maison… De toute façon, c’est ça qu’ils veulent : qu’on reste chez nous à crever de solitude devant la télé.»(p. 7)
« Moi, mon idée, c’est que les politiques sont poussés par la grande distribution, qui veut faire sauter le monopole des buralistes et mettre des cigarettes dans les supermarchés. Ces messieurs qui nous gouvernent, ils ont beaucoup d’intérêts dans la grande distribution, non ? - T’as peut-être bien raison, Henriette. Et comme ça, ils supprimeraient aussi les derniers endroits où on se cause. Y a de moins en moins de bars et de plus en plus chers, avec de moins en moins de gens dedans, etc » (id.)
Bigre ! De terribles « anarcho-autonomes » assoiffés de sang reprenant l’antienne d’un lobbyiste cabaretier du siècle dernier ! Les choses auraient-elles à ce point changé en 120 ans ? La décadence de la société bourgeoise serait-elle tellement avancée qu’il ne s’agirait plus désormais que de sauver, en un front uni des plus douteux, les dernières parcelles contemporaines de plaisir collectif ? Certes, à ce dont l’esprit se contenterait, on mesurerait alors, comme dit l’autre, toute l’étendue de sa perte. Mais encore ? Quelque sourde influence entreprenariale – et libérale – aurait-elle finalement submergé le cortex des camarades au point de leur faire défendre, à eux aussi, le petit commerce de proximité, vecteur de lien social ? Hypothèse déprimante que nous ne saurions retenir. Une autre vérifierait cette banalité de base – la désintégration du monde s’accélérant en effet, sa déshumanisation croissant en effet à rythme régulier et soutenu – que la seule critique dudit monde corrompu pouvant valoir quelque chose s’exerce toujours sur la vie quotidienne, rien d’autre. Et qu’à ce titre, cette fameuse poignée de subversifs que le pouvoir aime tant exhiber de sa manche, de temps à autre, histoire d’effrayer le chaland, ces vils terroristes, donc, loin d’être les spécialistes idéologiques fanatisés jetés en pâture à l’opinion, auraient plutôt vocation à parler, selon l’expression de M. Limousin, comme « le tout venant ». Comme tout le monde. Tout simplement. Ou en d’autre termes, simplement vocation à représenter  la majorité.

Quelle déception !
Pas grave, allez !
On retourne au Sénat se bourrer la gueule !