N. B. Toute préoccupation politique mise à part (ce qui n'est pas rien), on a toujours préféré cette version originale (≪Orages d'acier≫) du groupe à problèmes déjà ancien Plastic Gangsters à sa reprise par le groupe à problèmes contemporain Paris-Violence, dont le talentueux parolier royaliste Flav est récemment décédé. Pour les archivistes à problèmes ou les simples curieux (à problèmes aussi) désireux d'écouter cette dernière version, c'est là.
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En ce moment, on pense à l'Ukraine. On pense à la Russie. On pense à Ernst Jünger, et puis à bien d'autres trucs encore, susceptibles de poser problème au plan fasciste-transcendantal : c'est rien de le dire. Il faut avouer qu'en termes de problèmes théoriques, de manière générale, le manque radical se pose un peu là. Un copain trotskiste (personne n'est parfait : et tant d'autres, d'obédiences diverses, soutiennent ce genre de position) nous renvoyait encore récemment, comme dans un livre (y croyait-il seulement ?) les deux ≪impérialismes≫ (le russe et celui de l'OTAN) dos-à-dos, simplement, comme cela. N'étaient-ils pas, en l'espèce et après tout, également responsables, très également coupables et malfaisants ? Livrer des armes à l'Ukraine libérale pro-européenne ne revient-il pas, ajoutait ledit ami, à ≪rajouter la guerre à la guerre≫ ? Rien d'autre de spécifique ni d'original ne semblait donc ici à interroger, à comprendre. Qui comprend vraiment le sens, pour ne s'en tenir qu'à cela, des séductions fascistes actuelles ? Qui comprend que, faute de médiation, de discussion, d'oppositions rationnellement posées (la faute à la pandémie confinesque, bien entendu, mais pas que ! ce serait trop simple), la violence anti-bourgeoise immédiatiste, sans question, a tôt fait d'emporter l'esprit, dans les populations, d'une majorité radicalisée, en mode manifeste-conspirationniste. Le film Boum Boum, de Laurie Lassalle, vu ces jours-ci et consacré, tout ensemble, à l'amour libre et au mouvement des Gilets Jaunes, sans présenter les choses ainsi, possède néanmoins le mérite d'évoquer ces problèmes et ces ambiguïtés, quoiqu'il ne se les coltine guère, ou qu'il se les gère vite. Et qu'il souffre d'autres défauts typiquement gauchistes, encore, affirmant, relayant ou supposant abstraitement beaucoup de choses convenues (sur l'universalisme, ou sur la beauté des révoltes ≪impures≫, dont les Gilets Jaunes fourniraient le modèle). Mais il est vrai que ce film donne avant tout à découvrir des pensées fragiles, en train de se faire ou de se défaire, en crise. Et qu'il est, dans l'ensemble, bon, sain, romantique. Il finit, surtout, par une touche d'espoir et de mer, une espérance de retour de marée subversive qui reviendra forcément, gigantesque, dans la gueule de Macron second et de ses suiveurs. Il a, bien évidemment, raison. C'est juste que bon. Nous préférons poser les choses autrement, sous forme de problème maintenu et de pulsion de mort, nous qui aimons tant la mer pour cette raison précise, le charme du ressac et des problèmes qui durent : pour cette résistance même. Pour l'utopie, toujours meilleure que les réalisations qu'elle provoque. Pour la révolte et ses justesses, toujours supérieures à leur contenu positif (à la fois légitime et contingent). Bref : tout ce qui, hélas ! nourrit aussi la variété de fascisme pourrissant la pensée et la vie d'aujourd'hui, en tout et partout. Notre amertume vient de cela que, peut-être, la chanson emblématique de ces temps sinistres, à parodier méchamment l'Âge d'or de Léo Ferré, pourrait tourner ainsi, vers la fin : ≪Nous aurons Poutine devant tous nos problèmes !≫. Poutine est partout. Il nous voit en ce moment et se moque bien de nous. La seule chose dont il se ne se moque pas, ce sont les Ukrainiens qui veulent rester libres, qui sont attachés aux libertés formelles bourgeoises, comme disent les marxistes sans morale, et qui lui mettent des Javelins dans les chars. Il nous manque, décidément, de ce côté-là du monde, cette compréhension du fascisme de notre temps, de ce poutinisme anthropologique menaçant par principe, de l'Atlantique à l'Oural, le moindre de nos efforts pratiques.
En l'occurrence, il ne s'agit pas tant de savoir si l'impérialisme truc est pire que l'impérialisme machin, mais d'évaluer la pertinence, d'un point de vue libertaroanarcho mon cul ou tout simplement humain, qu'il y a à soutenir le nationalisme panukrainien contre le nationalisme russe. Je vous laisse imaginer si en France les tarés du Picard Crew contrôlaient la frontière Belge en cheville avec la DGSI et qu'on continuait à prétendre nonobstant que l'extrême droite y serait un problème marginal. Il ne faut pas oublier que ce n'est pas tant le soutien populaire que l'aveuglement de ceux qui ont prétendu l'instrumentaliser qui a mené Hitler au pouvoir (faut-il rappeler que pour un nazi un coup de talon ferré dans la gueule vaudra toujours tous les coups de tampons sur un carte d'électeur). Les Masques de la Révolution de Paul Moreira (2016), qu'on saurait difficilement taxer de poutinophilie, est éloquent. Voir également ses réponses aux critiques ici et ici, avec ce judicieux rappel: «Renoncer à dire ce que l'on sait parce que "ça fait le jeu de la propagande" russe, c'est soi-même devenir un propagandiste. On omet. Pas parce qu'on est menteur mais parce qu'on est pétri de bonnes intentions. Ne jamais oublier : de ces renoncements, naissent les pires théories du complot.» Plus récemment, d'autres journalistes encore ont l'air d'avoir surmonté le nouveau paradigme covidien, et ça donne ceci (et oui, ne pas minimiser la profondeur du problème tout en pointant la totale hypocrisie russe, c'est comme chez Hassan Cehef).
RépondreSupprimerPour le reste, évidemment qu'il y a quelque chose de profondément satisfaisant à voir Poutine l'Embrouille brillamment démontrer que, thermonucléaire mis à part, il n'a décidément pas grand chose à opposer aux p'tites tapettes honnies de l'Occident. Cependant, plus que l'Ukraine, c'est la démocratisation de la Russie qui devrait être la question centrale de tout ce bordel (la guerre est la continuation de bla, bla, bla, je sais, je retarde, sûrement à cause de ma viscérale détestation de tous les gens de guerre). Disons que si le bain de sang qui s'annonce (boys don't cry: la plus grosse, toujours la plus grosse et la plus dure) y débouche, tout n'aura pas été perdu mais simplement très, trop, cher payé.
Question musique je laisse le mot de la fin à l'immense Fred Neil.
Croyez-vous que le Picard crew spirit soit pas déjà majoritaire dans la Police aux frontières française ? Est-ce une raison valable de relativiser l'invasion fasciste russe ? Le bataillon Azov n'est plus ce qu'il était vers 2014, idéologiquement parlant. Il a été submergé de volontaires qui diluent en lui l'influence nazie (laquelle certes n'a pas disparu). Mais dans l'ensemble vous faites trop peu de cas de la démocratie bourgeoise, et de ce qu'elle permet, fût-ce contre elle-même (sa captation de classe de l'universel, ses mensonges, sa violence native)...
SupprimerLa démocratie bourgeoise et toutes "ces putains de libertés", comme le rappelle LSD dans sa très pertinente chanson " Irina blues"...
SupprimerMais (bordel de pompe à nœud) où ai-je donc relativisé l'invasion russe (avez-vous lu l'article sur blast? ce qui dérange Poutine c'est que les nazis ukrainiens ne sont pas russes)? C'est quand même dingue ça... si vous dites qu'il y a un sérieux problème avec le nationalisme ukrainien (ex. le délire autour de la langue russe, le bombardement des populations des régions séparatistes pourtant censées être une sorte d'otages, etc.) c'est que vous donnez raison à Poutine. Voilà quand même où on en est rendu: «parce que Poutine», chanter l'héroïsme de l'armée ukrainienne ou rien (car c'est connu: l'air de la caserne émancipe). Tout de même... dans un rapport de l'OFPRA (je graisse et hyperlie):
SupprimerLe même auteur, dans un article publié en mars 2018 par l’agence d’information Reuters, évoque le problème persistant des violences commises par les groupes d’extrême-droite et de leur impunité : le 28 janvier 2018, environ 600 partisans de la « Milice nationale », un groupe d’extrême-droite comprenant des membres du bataillon Azov, manifestent à Kiev pour réclamer le droit de « maintenir l’ordre par la force ». Le même jour, des partisans de ce groupe perturbent une réunion du conseil municipal de Tcherkassy (Ukraine centrale). C14 et d’autres groupes radicaux, à Kiev et au moins dans 21 autres villes, ont obtenu le droit d’établir une « garde municipale » et de patrouiller dans les rues
Amnesty International, dans un communiqué paru en juillet 2018, note que :
« On assiste depuis 2017 en Ukraine à une multiplication des violences et des crimes motivés par la haine perpétrés par des personnes appartenant à des organisations d’extrême droite. Les membres de groupes tels que C14, Traditsii i Poryadok, Natsionalni Droujyny ou Karpatska Sitch, ont violemment fait irruption dans des manifestations publiques, des débats et divers autres rassemblements organisés par ceux et celles qu’ils qualifient d’ennemis de l’Ukraine (militant-e-s des droits des femmes, personnes LGBTI, journalistes, Roms, etc.). Depuis l’annexion de la Crimée par la Russie, en 2014, et le début du conflit avec les séparatistes soutenus par les Russes, dans l’est du pays, la société ukrainienne s’est fortement polarisée. Les groupes d’extrême droite profitent de la situation tendue qui règne pour prôner et commettre des actes de haine et fondés sur la discrimination. La plupart des crimes commis par des groupes d’extrême droite sont restés sans réponse de la part des autorités ukrainiennes, qui ne veulent ou ne peuvent manifestement pas enquêter de manière efficace, même lorsque lesdits groupes d’extrême droite revendiquent publiquement leurs actes. De toutes les affaires suivies par Amnesty International, seule celle de l’attaque menée en août 2017 contre une manifestation LGBTI organisée à Zaporijjia a donné lieu à une enquête ayant débouché sur des poursuites judiciaires. Les enquêtes entamées sur plus d’une trentaine d’autres agressions ne sont pas allées au-delà du stade initial de l’enregistrement de la plainte. Qui plus est, lorsqu’une enquête est ouverte par les autorités sur un crime motivé par la haine, il est rare que celles-ci s’intéressent au caractère discriminatoire des motivations des auteurs présumés. Les victimes sont rarement informées de l’avancement des enquêtes, ce qui leur donne l’impression que rien ne se passe. Aucun responsable des pouvoirs publics ukrainien n’a condamné publiquement la montée des violences perpétrées par les groupes d’extrême droite. [et on doute que ça change beaucoup dans le futur] »
J'ajoute que ce n'est pas parce que l'Ukraine veut (fantasme de) rejoindre l'Europe, qu'elle aspire à la démocratie libérale. La Hongrie et la Pologne y aspirent si peu qu'elles sont à un cheveu de lourdes sanctions.
SupprimerEt non, désolé, je ne crois pas que les flics français aujourd'hui pensent appartenir à une race supérieure ni ne tiennent les SS de Das Reich pour un groupe d'avant-garde. Pas plus d'ailleurs que les électeurs du [FR]N, faut quand même pas tout mélanger (ce qui ne revient pas à dire qu'il n'y a pas de problème, qu'on m'accuse pas de relativiser le racisme en France).
" évaluer la pertinence, d'un point de vue libertaroanarcho mon cul ou tout simplement humain, qu'il y a à soutenir le nationalisme panukrainien contre le nationalisme russe" : voilà quel était (à vous citer) votre propos.
SupprimerPropos posant problème, en l'occurrence (en tout cas à nous), car nous ne soutenons pas un nationalisme contre un autre ; nous soutenons la pertinence supérieure (et osons-le dire ainsi : la justice) qu'il y a à défendre la position bourgeoise du Droit international (établissant des frontières internationalement reconnues, qu'elles l'aient été pour de bonnes ou de mauvaises raisons, c'est-à-dire des raisons de fait, historiques et politiques) contre la position historiciste excluant tout décentrement (l'Ukraine c'est la Russie car y a 1000 ans il s'est passé bla bla bla dans le coin ; telle partie de la Russie, c'est l'Ukraine, car y a 1000 ans le gène ukrainien y régnait en maître, j'ai des preuves, etc). Le Droit, face à la barbarie subjectiviste de la pulsion appropriatrice. Il ne s'agit donc pas, en l'espèce, d'un affrontement entre deux nationalismes. Le fait que le nationalisme, au sein de chaque camp, joue un rôle de catalyseur, et de ressource énergétique, est un autre problème. Les manifs LGBT rencontrent autant d'emmerdes en Russie qu'en Ukraine, dans les pays musulmans que dans certains nids à fachos français. On ne peut pas, dans le cas présent, renvoyer chaque camp à son nationalisme : c'est ici ce que l'esprit critique interdit, justement, au nom de ce qui le fonde (on aurait tendance à l'oublier) : la croyance maintenue en l'existence d'un vrai et un faux, d'un Bien et un Mal, de normes objectives de ce genre s'appliquant aux situations sociales.
Et on rappelle ici que près de 2/3 des flics français ont voté Le Pen aux dernières élections législatives. C'est factuel. Vous retrouverez facilement cette statistique, dont même Mélenchon, ce con de "neutraliste non-aligniste" s'était servi en son temps. Combien ce sera, à la présidentielle de cette fois-ci ?
SupprimerQuestion droit international, Poutine se base sur deux précédents: 1) l'invasion de l'Irak, justifiée par des mensonges à peine moins gros que les siens; 2) l'indépendantisation du Kosovo, brillante réalisation occidentale s'il en est. Certes l'infraction ne saurait annuler la règle, mais il n'a nullement innové en la matière. Et ce n'est pas tant nous qui avons Poutine devant tous nos problèmes que Poutine qui a l'Occident devant tous les siens. Il faut comprendre qu'il a toujours voulu être considéré comme un acteur-clé de l'ordre mondial et que les américains l'ont toujours délibérément ignoré (jusqu'à Biden, pensant tout haut qu'il ferait peut-être une incursion mais pas plus, façon de dire que la Russie OSEF). De même qu'il n'a certainement pas oublié la pour le moins rocambolesque ré-élection de Ieltsine après son désastreux premier mandat. Pour couronner le tout, l'absence d'application des accords de Minsk, qui prévoyaient une autonomie des régions séparatistes bombardées par Kiev, ce n'est quand même pas de sa faute. Personne n'a voulu résoudre sérieusement cette crise «parce que Poutine, quand même», et voici où nous en sommes rendus: une armée russe enlisée, donc une boucherie annoncée. Victoire et, surtout, gloire éternelle aux martyrs! En bref, dire que cette guerre est justifiée ou justifiable est un mensonge. Dire que le problème qu'elle prétend résoudre a été inventé par Poutine de toutes pièces ne l'est pas moins.
SupprimerEt oui, je dis bien « libertaroanarcho mon cul», parce que le seul point de vue acceptable serait un point de vue de classe ou au moins internationaliste. Or ce point de vue n'existe pas ou relève d'un piteux habillage, comme en 14 où on était tenu de s'engager pour la république française parce que l'empire allemand, quand même. On connaît le brillant résultat de cet engagement: 10 millions de crevés pour le Traité de Versailles, soit la politique comme continuation de la guerre par d'autres moyens (vae victis: la même attitude de merde qui a conduit Poutine au pouvoir). Comme disait l'autre, cette société demande à être jugée à ses ennemis plutôt qu'à ses réalisations (comme on la comprend).
Pour le vote RN des flics, je ne vois pas le rapport, Le Picard Crew considère le RN comme des mous, et plus généralement les néonazis se foutent des élections (ie. ce ne sont pas exactement des libéraux, ils n'ont pas plus à voir avec le RN que C14, Pravi Sektor, ...). Après, peut-être vous avez des infos comme quoi flics ukrainiens sont à présent gaucho-dilués...
Un point de vue de classe, ou "au moins internationaliste", en voici un : celui des cheminots biélorusses sabotant en ce moment même les rails de leur pays-croupion, et l'effort de guerre poutinien (l'entrée dans le conflit imminente dans le conflit de Loukachenko). Eux comprennent que tout point de vue de classe ou " au moins internationaliste" est un point de vue démocratique, ou dépassant (par le haut, c'est a dire réalisant) l'idéal démocratique bourgeois.
SupprimerC'était au reste la conception marxienne de la démocratie, toujours préférable à la dictature, quelque analyse qu'on ait de l'une et de l'autre (cf par exemple sa position sur la guerre de sécession)...
SupprimerMais je ne vous dis pas qu'il serait bon que la Russie gagne cette guerre (ce à quoi d'ailleurs plus personne ne croit), juste qu'il est stupide d'emboîter le pas du nationalisme ukrainien, parce que rien de bon n'est jamais sorti de là (c'est plutôt un sûr moyen d'étouffer toutes contestations internes au nom de l'union sacrée). De plus, si vous pensez que les Russes ne vont pas apprendre de leur humiliation comme les Ukrainiens il y a huit ans, vous présumez à mon avis beaucoup. Et comme, sauf réaction forte tout sauf certaine de l'opinion russe contre Poutine, on va probablement retomber grosso merdo sur de statu-quo merdique d'avant guerre, personne n'aura rien gagné dans cette boucherie (à part le patriotisme ukrainien triomphant et ses chefs). Il faudrait quand même que les esprits se refroidissent: nous sommes en train d'assister à une tragédie aux racines platement géopolitiques, pas à un armageddon civilisationnel (surtout avec les drones d'Erogan dans les forces du Bien).
SupprimerEdgar Morin
RépondreSupprimer@edgarmorinparis
12 mars 2022. A l’université Milano-Bicocca, Fiodor Dostoïevski est retiré des rayons de la bibliothèque.
Et donc ?
SupprimerEt donc, dans un moment où on en a plus que jamais besoin, on est soulagé de constater que l'esprit critique atteint pareils sommets.
SupprimerVive les artistes russes!
RépondreSupprimerhttps://youtu.be/QrU1hZxSEXQ
(je me demande d'ailleurs si c'est pas ici que j'ai vu ça ?)
Stylé.
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