lundi 30 octobre 2017

Fantassins et stratégie



(à partir de 0'44) :
« - Au moins, ils sont morts pour une bonne cause...
- Ah ouais ? Laquelle, au juste ?
- La liberté, non ? (...)
- Tu crois que c'est pour la liberté qu'on bute des bridés ? C'est un massacre, nom de dieu... Et si je dois me faire péter les valseuses pour un simple mot, autant que ce soit pour : Craque-boume-hue »

(Full Metal Jacket, Stanley Kubrick)

6 commentaires:

  1. Certes, mais ce n'est pas sa M60 qui fait le Marine. « Qui est Charles Whitman ? » (Sgt. Hartman)

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    1. Pour paraphraser Marx, " en tout marine, l'humain et le M60 - ou plutôt, le M16 armalite - SE COMBATTENT jusqu'à un certain point "
      Car il ARRIVE que les machines se dérèglent (Deleuze soutient exactement le contraire : "TOUTE machine ne marche vraiment qu'en se déréglant" : vertige et terreur). Non : c'est bien ACCIDENT si la machine humaine se dérègle. Accident simplement encore possible, souhaitable et heureux. Tel est le bug humain, vecteur d'espérance quand même : le "retour d'expérience", comme disent les macroniens sans comprendre la portée glorieuse, inconsciente, de leurs expressions gestionnaires...

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    2. À noter qu'ici la maman des animaux est cynique, c'est à dire un outil conscient de n'être rien d'autre qu'un outil. La scène qui irait plus dans votre sens est celle où les Marines posent pour l'interview télé, et où on voit qu'ils n'ont aucune idée de pourquoi ils sont venus tuer au Vietnam. Ce qui à mon avis est la thèse du film, à savoir que l'armée forme activement des psychopathes, de parfait techniciens du meurtre. Même Rasterman à la fin (« c'est qui le bourreau des cœurs !? » – quand on étudie la place du féminin dans ce film) est nettement plus illustratif que cette scène (où l'unité vient de perdre deux hommes, deux « camarades », au « chantage affectif », il ne faut jamais oublier cette dimension, cf. Outrages de B. De Palma).

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    3. Fine remarque. La scène de l'interview dont vous parlez était évidemment la plus pertinente. Mais impossible de la trouver sur ioutioube, raison pourquoi nous nous sommes en définitive rabattus sur celle-ci. Némésis de la technique, en quelque sorte, au détriment (savoureux, non ?) de son esprit même : c'est-à-dire CLARTE ET DISTINCTION...

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  2. Eurêka!

    On peut aussi citer Michael Herr (Putain de mort),
    scénariste sur le film :

    « Je croyais entendre les gouttes tomber sur le plancher métallique de l'hélicoptère. Hé !… Oh ! mais ce n'est rien du tout, ce n'est par réel, c'est juste une espèce de chose qu'ils font qui n'est pas réelle. Un des mitrailleurs de porte était écroulé sur le sol comme une poupée de chiffons. Sa main avait l'aspect d'une livre de foie cru et sanglant venue de chez le boucher. Nous nous sommes posés sur la même piste d'où nous étions partis à peine quelques minutes plus tôt mais je ne m'en suis pas aperçu avant qu'un type me secoue par l'épaule et alors je n'ai pas pu me lever. Je ne sentais plus mes jambes sauf qu'elles tremblaient, le type a cru que j'étais blessé et il m'a aidé à me lever. L'hélico avait été touché huit fois, le sol était couvert de débris de plastique, un des pilotes devant était mourant et le jeune soldat était à nouveau pendu aux sangles, il était mort, mais (je le savais) pas vraiment mort.

    Il m'a fallu un mois pour perdre ce sentiment d'être le spectateur de quelque chose moitié jeu, moitié spectacle.

    [...]

    Je pense sans arrêt à tous ces gosses qui se sont fait lessiver par dix-sept ans de films de guerre avant de venir au Vietnam se faire lessiver pour de bon. Vous ne savez pas ce que peut être un cinglé des médias avant d'avoir vu comment certains de ces troufions se remuaient pendant un combat quand ils savaient qu'il y avait une équipe de télévision dans le coin. En fait ils se faisaient un film de guerre dans leurs têtes, un petit numéro de claquettes sous les balles, les tripes et la gloire à la John Wayne, ils se faisaient trouer leur peau pleine de boutons pour la télé. De la démence, mais ce n'était pas la guerre qui les avait rendus fous. Pour la plupart de ceux qui se battaient, la guerre n'était plus une aventure dès les premières fusillades, mais il y avait toujours ceux qui ne voulaient pas lâcher ça, les quelques-uns qui faisaient leur cirque devant les caméras. Beaucoup de correspondants ne valaient pas mieux. Tous, nous avions trop vu de films, nous avions vécu trop longtemps dans la Cité Télé, dans la soupe des médias, nous étions presque incapables de faire certains rapprochements. Les quelques premières fois où je me suis fait tirer dessus ou que j'ai vu des morts au combat, rien ne s'est vraiment passé, toutes les réponses sont restées bloquées dans ma tête. C'était une violence familière, identique, simplement changée de décor, une sorte de jeu de la jungle avec des acteurs allongés dans des sacs de toile qui attendaient qu'une scène se termine pour se relever et partir sur leurs deux jambes. Sauf que dans cette scène (on finissait par le voir), on ne pouvait rien couper. »

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    1. Le cas échéant, si ça vous dit :
      http://lemoinebleu.blogspot.fr/2012/06/lucky-nyaq.html

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