lundi 31 août 2015

Notes sur la religion dans son rapport au communisme (4)

 
Le Moine bleu : 
La mise au pas des gens du Livre, 2543 ap. J.-C. l'imposteur 
(détail)

L'avenir de l'Islam n'est pas au djihadisme. L'avenir de l'Islam réside dans son intégration finale par le capitalisme, sous forme de redoutable supplément d'âme conservateur. Le djihadisme est une fièvre que le capitalisme ne saurait tolérer beaucoup plus longtemps, sous peine de risquer bientôt l'extinction brutale, et sanglante. C'est pourquoi ceux qu'effraie la notion de guerre de civilisation sont largement moins stupides que d'autres, révoltés par cette même notion au plan théorique. Il y a de quoi, en effet, être effrayé. Une guerre de civilisation se déroule évidemment sous nos yeux inaptes, de longue date, à plus rien saisir de phénoménal, une guerre d'intensité variable et opposant deux monstres : l'archaïsme, le non-contemporain, la réaction islamiques, d'un côté, et le libéralisme moderniste-tolérant de l'autre. Ce conflit se traduit essentiellement, en Europe occidentale, loin, très loin du champ de la production réelle (ce qui est au passage un signe extrêmement encourageant de haute compatibilité islamo-capitaliste) par la coexistence plus ou moins pacifiée, par la police laïque, de plusieurs espace-temps symboliques au sein d'un même espace prétendument public. Voici un couple de lesbiennes radicales, attablées en terrasse avec un transgenre de leur connaissance et devisant ensemble de la perspective de légalisation prochaine de la GPA pour les couples homosexuels par l'Assemblée nationale. À quelques mètres de là, dans la même rue du vingtième ou du onzième arrondissement de Paris, à la sortie de certain temple monothéiste, une toute autre convivialité suit son cours, en perruques et jupes longues hassidiques ou voile islamique, au choix, mais également sexuellement obsédée par la «pudeur» féminine, et vouant, sans aucunement penser à mal, la première convivialité (saphique-tolérante) au même enfer simplement objectif, dogmatique, bref théologique, c'est-à-dire sans question, au point de ne lier, par conséquent, avec ladite convivialité infernale que des relations «citoyennes» fortement distendues, sinon réduites au minimum. Souvent, pourtant, ces temps-ci, les lesbiennes radicales défendent farouchement les femmes voilées en tant que telles (le hassidisme, lui, étant intégralement tabou, fût-ce pour assurer sa défense éventuelle au nom de la diversité des «cultures»), contrairement au vieux féminisme bourgeois résiduel ayant du plomb dans l'aile (à défaut, comme l'ex-rédaction décimée de Charlie-Hebdo, d'en avoir pour l'instant reçu ailleurs pour prix de ses insupportables blasphèmes). Ce «droit inaliénable» à l'aliénation, et en l'espèce à porter le hijab ou le niqab dont les femmes, en terre d'Islam, se trouvent, rappelons-le, impitoyablement privées sous peine de persécution et de mort, figure, comme on le sait si l'on est un lecteur régulier des livres inestimables produits à chaque seconde par les Éditions de La Fabrique, chez nos anti-patriarcat d'Occident, le modèle glorieux de toute révolte féminine authentique. Il demeure, cependant, singulièrement plus rare que la réciproque soit vraie, et que les femmes voilées militent avec ferveur en tant que croyantes pour le droit des homosexuelles à jouir comme elles l'entendent, aussi fréquemment et librement qu'elles soient susceptibles de le désirer. Chacune des deux communautés représente, en vérité, l'enfer quotidien de l'autre, la différence résidant dans l'acceptation plus ou moins honnête de ce fait, la possibilité, plus ou moins verrouillée par l'obligation religieuse ou  crypto-religieuse - à direction toujours masculine - d'une telle acceptation. Telle est la modernité libérale du moment, du moment de cette non-rencontre perpétuelle, dans sa version bancalement tolérante d'atomisme idéal. Un atomisme que la religion ne vient somme toute ici que couronner, renforcer, sanctifier, consacrer pour jamais, à la faveur de ses ignobles et habituelles postures d'éternité.  

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