mercredi 8 janvier 2014

Vorspiel

« Il fait nuit… Les premières mesures solennelles sont à peine distinctes. Le Rhin immense, l’ancien des fleuves, roule silencieusement ses flots, premiers-nés du monde, et les brumes des Eddas, les visions des vieilles cosmogonies, plus lointaines que les traditions des hommes, s’éveillent. Et toujours des flots sur des flots… Puis les larges montagnes humides s’écroulent et se mêlent, et les cercles des vagues, confondus avec l’espace, s’étendent, se prolongent, se perdent, poussés par de nouveaux flots qui montent, grossissent et disparaissent, dans le tumulte de l’eau surnaturelle… L’eau, comme un poids harmonieux, oppresse les sens subjugués, le murmure initial est devenu tonnerre, car les ondes sacrées baignent maintenant les pieds de la montagne des dieux. La toile s’enlève brusquement sur l’intérieur même du fleuve, et parmi les flots crépusculaires, des voix de cristal se répondent. »

(Villiers de l’Isle-Adam, L’Or du Rhin, dans L’Universel du 21 septembre 1869).  
                      

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