dimanche 16 mars 2014

Gangsters, malfrats et révolutionnaires (3) Dostoïevski au gnouf

Dostoievski, bagnard russe du temps où les bagnes existaient en Russie.

Fiodor Mikhaïlovitch Dostoïevski tombe au petit matin du 23 avril 1849 pour « activités subversives clandestines ». Il lui est reproché, entre autres ignominies, d’avoir fréquenté à Petersbourg le cercle littéraire et politique de Petrachevski (rencontré par l’écrivain au printemps 1846), et de s’y être prononcé à titre personnel – au cours des « vendredis » de ce groupe – en faveur de réformes modestes touchant la presse, le servage, le Droit civil et pénal. L’engagement de Dostoïevski, comme celui de l’ensemble des Petrachevski bientôt condamnés avec lui, paraît certes bien timide en regard des peines extrêmement lourdes dont l’État, aussitôt, les écrase. Et certains imbéciles démocrates d’aujourd’hui – sans même parler des clowns pro-russes et nostalgiques stalino-tchékistes habituels – ne manqueront point, au rappel de ces événements sinistres, d’en rajouter une louche sur l’horreur décidément incommensurable ! d’un régime tsariste barbare justement balayé, quelques décennies plus tard, par la sublime insurrection de 1917 (ceci quoique les pro-russes actuels éprouvent désormais le plus grand mal qu’on sait à trouver les insurrections sublimes, que ce soit en Ukraine ou ailleurs). Bref, Poutine ne serait pas Nicolas 1er, il en serait même l’exact opposé, et la continuité séculaire assurée en Russie – dans les consciences mêmes, et d’un régime à l’autre – d’une logique autocratique à dominante pénitentiaire serait une pure vue de l’esprit occidentaliste. Peu importe que Herzen (pour nos lecteurs les plus jeunes : un vilain libéral-libertaire de l’époque, à tendance violemment BHListe) ait célébré un jour l’ouvrage du Marquis de Custine (pour nos lectrices les plus innocentes : un ignoble activiste du Mariage pour tous et des lobbys homosexuels français d’autrefois), traitant de ces questions dès la fin des années 1840, comme « le livre le plus intelligent jamais écrit par un étranger sur la Russie ». Et peu importe, bien sûr, plus près de nous, les deux ans de camp de travail infligés (suite, rappelons-le, à leur simple irruption musicale dans une église) aux très couillues Pussy Riot (dérisoirement moquées par les antiféministes crasseux d’aujourd’hui, lesquels sont soit des châtrés soit des fascistes, et le plus souvent les deux) sur ordre d’une crapule mafieuse du KGB prenant directement ses ordres cléricaux quotidiens auprès du répugnant patriarche Kiril.
Bref.
Ce qui nous intéresse ici, c’est le regard particulier jeté par Dostoïevski sur le bagne et ceux qui le peuplent, majoritairement contre leur gré.
Condamné à mort le 16 novembre 1849 avec 20 autres accusés, au terme de son procès, l’écrivain subit d’abord un cruel simulacre d’exécution, le 22 décembre au petit jour, puis est transféré au camp de Omsk, où il arrive le 23 janvier 1850.
Il y passera exactement quatre ans, qui changeront radicalement sa perception des réalités russes, le prisonnier russe incarnant ensuite pour Dostoïevski une sorte de raccourci symbolique privilégié de l’âme russe elle-même. Sa religiosité congénitale, sa violence anomique décomplexée, sa tendance égale à l’excès et à la soumission, son respect sans question de l’autorité de caste, mêlé cependant d’un ressentiment, d’une haine viscérale et inextinguible des riches : tout cela résume la Russie aux yeux de Dostoïevski, lequel bascule d’un même mouvement, après cette expérience carcérale, dans le christianisme messianique, le panslavisme et, conséquemment, la détestation systématique de l’Occident (de la France en particulier, alors qu’avant son emprisonnement, Dostoïevski était autant francophile que francophone) : un Occident conchiant volontiers, certes, hier autant qu’aujourd’hui, l’épouvantable servilité russe prenant presque valeur de tradition locale.

Ces textes nous parlent aussi d’un certain invariant carcéral : l’opposition, dont on méditera encore et toujours la possible pertinence, entre «politiques» et «droit commun», révoltés et voyous, gangsters et révolutionnaires. La raison en est simple : Dostoïevski eut, au bagne, des rapports aussi difficiles avec les uns qu’avec les autres (sa préférence allant néanmoins aux simples délinquants). La taule représente-t-elle un simple résumé de la société de classes, concentrant simplement, accusant les misères objectives de l’extérieur (domination, libéralisme, injustice, ineptie des rapports humains) ? Doit-elle, au contraire, faire l’objet de discours et de pratiques spécifiques, voire spécialisés, et être considérée le creuset fondamental des grandes révoltes prométhéennes de l’avenir, au nom de la détermination, du courage et de la force propres à ceux que ces qualités font inévitablement, partout sur cette planète, jeter au gnouf un jour ou l’autre ?
Il est probable que ces interrogations dureront autant que le gauchisme lui-même, ce dernier étant entendu ici par nous au sens noble (profitez-en ou rassurez-vous, comme vous voudrez : cela ne sera, loin s’en faut, pas toujours le cas) comme un certain besoin d’inquiétude sociale radicale, hautement et parfaitement conscient de lui-même.


Pornographes occidentalistes et féministes pro-sionistes à la solde de la CIA et de la pédophilie organisée du FMI attendant leur juste sort dans un luxueux réduit démocratique du fond de l'Axe du Bien, 2012.
 

« Au bagne, dans le milieu qui l’entourait, il y avait naturellement bien des choses qu’il ne remarquait pas, et d’ailleurs ne voulait pas remarquer. Il vivait pour ainsi dire les yeux baissés : il avait une peine insurmontable et du dégoût à regarder. Mais, finalement, bien des choses l’étonnèrent et, comme malgré lui, il commença à remarquer ce que précédemment il ne soupçonnait même pas. D’une façon générale, ce qui l’étonna le plus, ce fut l’abîme infranchissable, effrayant, qu’il y avait entre lui et tous ces gens. Ils appartenaient, lui semblait-il, eux et lui, à des nations différentes. Ils se regardaient, eux et lui, avec méfiance et inimitié. Il savait les raisons de cette désunion et les comprenait ; mais jamais auparavant il n’aurait admis que ces raisons fussent réellement si profondes et si fortes. Au bagne, il y avait aussi des Polonais, déportés criminels politiques. Ceux-là considéraient purement et simplement tout ce peuple comme des ignorants et des manants et le méprisaient de tout leur haut ; Raskolnikov, lui, ne pouvait juger ainsi : il voyait clairement que ces ignorants étaient sur bien des points infiniment plus sensés que ces mêmes Polonais. Il y avait aussi des Russes qui méprisaient non moins grandement ce peuple, un ancien officier et deux séminaristes : Raskolnikov remarquait clairement leur erreur, à eux aussi.
Lui-même, on ne l’aimait pas ; tout le monde le fuyait. Sur la fin, on commença même à le haïr, et pourquoi ? Il n’en savait rien. On le méprisait, on riait de lui, on riait de son crime, ceux-là mêmes qui étaient infiniment plus criminels que lui.
« Tu es du côté des maîtres ! lui disait-on. Était-ce à toi de lever la hache ? Ce n’est pas l’affaire des maîtres. »
Dans la seconde semaine du grand carême, son tour vint de se préparer à communier avec sa chambrée. Il allait à l’église et priait avec les autres. Pour quelle raison, il ne le savait pas lui-même, mais une dispute se produisit un jour ; tous tombèrent sur lui avec exaspération :
« Tu es un athée ! Tu ne crois pas en Dieu ! lui criait-on. Tu mériterais qu’on te tue. »
Il ne parlait jamais avec eux de Dieu ni de religion, et pourtant ils voulaient le tuer comme impie. Il se taisait et ne leur répliquait rien. Un bagnard se jeta sur lui dans un véritable accès de rage ; Raskolnikov l’attendit calmement et sans ouvrir la bouche. Il ne fronça pas le sourcil, pas un trait de son visage ne bougea. Le soldat de garde put à temps s’interposer entre lui et le meurtrier, autrement le sang aurait coulé. »

(Crime et Châtiment)

Note : le nom de Raskolnikov vient de Raskolnik (« vieux-croyant » : variété d’hérétiques schismatiques russes demeurés fidèles à la « vieille foi », celle d’avant les réformes d’un certain patriarche Nicon (ni très malin, assurément) au milieu du XVIIème siècle. À l’époque de Dostoïevski, la secte comptait encore quelque dix millions d’adeptes, rebelles durement réprimés, fournissant de vastes contingents pénitentiaires. Au chapitre III de ses Souvenirs de la maison des morts, Dostoïevski dresse ainsi le portrait fort élogieux d’un de ces « vieux-croyants » (incendieur d’églises officielles, en l’occurrence) entouré, selon l’écrivain, au bagne, du respect (et de la considération) général. Il est probable qu’il s’en soit souvenu au moment de la rédaction de Crime et Châtiment.

                                                            ***
 

« Dans l’attente du changement de fers, je m’entretins avec Joachim Akimytch de mes premières impressions de bagne.
- Oui, ils n’aiment pas les nobles, remarqua-t-il, surtout les politiques, ils les mangeraient tout vifs, et ça se comprend… D’abord, vous êtes d’autres hommes qui ne leur ressemblent pas, et ensuite eux tous, ils étaient autrefois ou bien serfs, ou bien soldats. Jugez vous-mêmes s’ils peuvent vous aimer. »

(Souvenirs de la maison des morts)

                                                            ***
 

« J’ai toujours été étonné de l’extraordinaire bonhomie, de l’absence de rancune avec laquelle tous ces battus parlaient de la façon dont on les battait, et de ceux qui les battaient. Souvent on ne percevait pas l’ombre de rancune ou de haine dans un récit qui, par moments, me soulevait le cœur ou le faisait battre violemment. Eux, racontaient et riaient comme des enfants (…) Il n’est pas possible, me disais-je parfois, qu’ils se jugent entièrement coupables et dignes du châtiment corporel, surtout quand ils ont péché non pas contre les leurs mais contre des chefs. La plupart ne se reconnaissaient nullement coupables. Je l’ai déjà dit, je n’ai jamais remarqué chez eux de remords, même dans les cas où le crime avait été commis contre leur propre milieu. Des crimes contre les supérieurs, inutile de parler. Il me semblait parfois que, dans ce dernier cas, il y avait de leur part une façon particulière, comment dirai-je ? pratique ou, mieux, pragmatique de voir les choses. Ils prenaient en considération le destin, le caractère inéluctable du fait, et cela non point après réflexion, mais simplement, inconsciemment, comme une espèce de foi.
Le forçat a beau être porté toujours à se sentir dans son droit pour les crimes contre les autorités, de sorte que pour lui il n’y a même pas de problème, il a cependant conscience, pratiquement, que les autorités voient son crime d’un tout autre œil et que, par conséquent, il doit être puni : après quoi on est quitte. La lutte, ici, est réciproque. Le criminel sait, à n’en pas douter, qu’il est acquitté au tribunal de son milieu originel, du simple peuple, lequel, encore une fois il le sait, ne le condamnera jamais entièrement, et la plupart du temps l’acquittera même tout à fait, pourvu que son péché n’ait pas été contre les siens, contre ses frères, contre le simple peuple dont il sort. Sa conscience est tranquille, or sa conscience fait sa force : il n’est pas troublé moralement, et c’est l’essentiel. Il sent, dirait-on, qu’il a sur quoi s’appuyer, et c’est pourquoi il ne hait pas : il accepte ce qui lui est arrivé comme un fait inévitable, qui n’a pas commencé avec lui et ne finira pas avec lui, mais durera encore longtemps au cours d’une lutte instituée une fois pour toutes, passive, mais acharnée. Quel soldat hait personnellement le Turc, quand il fait la guerre ? Pourtant, le Turc l’égorge, le perce de sa baïonnette, tire sur lui. »

(Souvenirs de la maison des morts)

12 commentaires:

  1. Ah ! Vous voila enfin décemment habillé ! Ce n'est pas trop tôt. Et vous avez également avantageusement troqué votre sourire béat pour le rictus grave qui convient à votre sacerdoce. C'est bien, vous avez fait des progrès,continuez comme cela. Vous savez que l'habit fait le moine.

    Coco bel oeil

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  3. L'avenir du Spectacle est à la démocratie de contrôle, flicaillerie entreprenariale mâtinée de religion et de pudibonderie, qu'elles soient laïques progressistes ou monothéistes tartuffiennes. Chine, Russie, Qatar. Tel est l'avenir efficace, version trio de tête, de la marchandise tel qu'elle l'envisage sereinement pour son propre compte. La canaille littéraire rouge-brun faisant au quotidien la fine bouche devant les libertés bourgeoises fondamentales en France, ou dans des républiques de même farine, nous a toujours débecté. Quels cris d'orfraie ne pousserait-elle pas, cette canaille, confrontée au tiers de ce qui se trouve imposée par la schlague à la jeunesse ouvrière russe, laquelle, bien entendue, conchie Poutine et toutes ces sales races de miliciens fascistes qui lui ressemblent et lui rendent la vie et le bonheur impossibles. Puisse-t-on la déporter un peu au besoin, çà et là, la canaille en question, pour son information, celle-là qui ne perçoit pas - car la canaille est ignorante et, à proprement parler, ne voyage jamais, fût-elle au bout du monde, fût-elle (elle l'est) pétée de thunes et de commodités en tout genre - l'affaissement intellectuel généralisé, innommable, inédit, partout produit par la dictature kgbiste de marché. Le pire Spectacle diffus génère toujours, en regard de cette gémellité néo-autoritaire, un degré moindre d'ineptie, puisque pouvant du moins susciter formellement son antithèse absolue - le communisme - quelque débiles que soient ses oeuvres moyennes et supérieures. Ailleurs, la simple terreur physique de penser, de mal penser, de penser dangereusement, pour soi, ses amis, sa famille, ne produit à la longue rien d'autre, dans les consciences, qu'une traînée de poudre merdeuse de bêtise et de soumission la plus crasse. Voyez l'état de la pensée révolutionnaire en Chine, au Vietnam, en Russie, en Iran, et dans tout autre charmant secteur de l'Axe du Bien tel que défini par les pro-russes. Voyez tout le cas(rcéral) que ces régimes font de la poésie, de la littérature, de la philosophie. Rien. Des flics, des curés, des marchands, des goulags. Et puis que dalle : un désert libéral où l'étudiant en commerce, l'ingénieur en agronomie, le diplômé en tourisme représenteront le parangon désirable des vertus humaines. Un désert auprès duquel le nôtre, dont nous ne nierons pas, certes, la consternante aridité, ressemblerait pourtant davantage à ces plages du sud-atlantique français où certains esprits libres aiment à batifoler et marivauder, entre deux considérations politiques et philosophiques d'importance nulle. Les ancêtres imbéciles de la canaille souverainiste française crachaient déjà, comme un seul Chaouch, sur les insurgés de Budapest, en 56, au motif (la chose était d'ailleurs parfaitement exacte, et alors ?) que parmi eux se trouvaient moult ancêtres imbéciles de l'actuel Secteur Droit kiévien. Nous nous en foutons. Nous pissons à la raie des souverainistes de tous pays. Nous leur chions à la gueule. Ceux qui soupçonnent, aujourd'hui, chez le commissaire Poutine la moindre trace de "conviction" politique (sans même parler de communisme, ce qui arrive, il est vrai, chez les plus cons de tous) ne méritent ni égards ni patience. Selon le mot de René Char (russe, bien sûr).

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    1. Bravo mon cher Moine ! Ah, je vous retrouve enfin ! Vous voir ses derniers temps avec ses airs de minet, je désespérais d'entendre de nouveau votre verge virile. Je suis rassuré.

      Coco bel oeil

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  4. Cher moine, je vous offrirais bien ma petite culotte.

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  5. Un bien bel article.
    A propos de la toujours pénible différence entre "politiques" et "droits cos", il me semble que Varlam Chalamov ait été assez pénible dans les souvenirs de son séjour au frais. Mais ce sont de vieux souvenirs.
    Le taulard comme sujet historique du changement radical ?
    Permettez-moi d'en douter.
    L'univers carcéral est à mon sens, plutôt un concentré de société, n'importe laquelle d'ailleurs, dans lequel les relations de pouvoir sont poussées au délire.
    Un peu comme à l'extérieur en somme, que ce soit à Pyongyang ou à Madrid.
    Et merci pour le coup de chapeau au père René Char qui ne s'est au moins pas contenté d'écrire des poèmes patriotiques en douce.
    A vous lire.

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  6. Ce sujet-là (de discussion) est forcément hautement piégé : par l'État qui, une fois de plus en ce domaine, fixe souvent hélas ! les termes du débat. Tel de ses ennemis qu'il enverra pourrir en prison durant des dizaines d'années, ou soumettra à toute autre peine d'élimination, sera considéré - du fait même de la répression qui s'abat contre lui - comme intouchable au plan politique par le partisan du négatif, soucieux d'éviter (à juste titre) toute distanciation crasseuse, et aussi défini, notamment par Marx (dans le Manifeste) comme recherchant nécessairement le point de vue adverse le plus résolu vis-à-vis de l'existant. L'État annule donc parfois, en cela, toute discussion entre camarades en même temps qu'il les annule eux-mêmes, physiquement. Il nous souvient à ce sujet de certaine discussion pénible (peut-être également trop avinée, certes) d'il y a quelques années, roulant sur les USA des années 1970, et dont il ressortait - pour notre contradicteur (très énervé) du jour - que les Black Panthers incarnaient davantage ledit négatif de l'histoire, en l'espèce, que tout autre groupe radical d'alors : les Weathermen, notamment, preuve en étant que l'État ricain massacrait, enfermait, et traquait plus intensément les BP que les autres (présentés, par ailleurs, comme bourgeois, petits-blancs et autres sympathiques qualificatifs du même genre). Or, au-delà des poses martiales spectaculaires des BP (et sans renier, bien sûr, l'ensemble de leur travail utopique concret auprès des prolétaires noirs), il nous semblait, à nous, que leur pure rhétorique maoïsto-nationaliste contrastait souvent fortement avec certaines actions extrêmement audacieuses et pertinentes desdits Weathermen. Et il est tant d'autres exemples historiques - plus récents - qui nous viendraient à l'esprit. Ici et ailleurs. Bref. En attendant, le taulard : sujet historique spécifique ? Nous nourrissons sur cette question les mêmes interrogations que vous. James Carr a écrit là-dessus des choses décisives.

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  7. Sachez que je partage entièrement votre malaise et vos interrogations.
    Si un des critères pour juger de la radicalité doit être l'attitude de l'Etat, alors y'a plus qu'à se faire djihadiste.
    Mais après tout devrions-nous choisir de préférer certains groupes à d'autres comme de la marchandise au supermarché ?
    Qu'on me comprenne : l'idéologie est une chose, l'individu une autre. Je veux dire par là qu'en d'autres lieux j'ai pu connaître certaines personnes appartenant à des groupes sinon totalement ennemis, du moins qu'on peut qualifier de staliniens qui se sont révélées à l'usage bien plus fiables, conséquentes, voire humaines que d'autres "camarades" plus conformes à nos idées.
    Mais je ne vous apprend rien là.
    Ce qui est plus rigolo, c'est qu'on voit fleurir ces jours-ci un paquet d'ex qui, avec un grand sens de la mémoire sélective, mythifient un certain nombre d'expérience révolutionnaire, armées ou pas, sans une once d'autocritique et en oubliant au passage pas mal d'autres camarades.
    Je me permet de vous conseiller sur le sujet ce petit film que nous sous-titrâmes :
    http://iaata.info/Film-Autonomie-ouvriere.html
    Sur ce, je m'en vais lire Carr

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  8. "Crève" de Carr est une des plus grandes expériences de lecteur qu'il nous ait été donné de vivre. Sa violence, sa pertinence politique sont également traumatisantes. Du niveau, pour nous, de Dante. Si vous ne le connaissez pas encore, vous avez de la chance. La lecture synchronique ou parallèle des "Frères de Soledad" de Jackson est très intéressante.
    Bien à vous.

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