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Michel Sapin, socialiste. |
Quoique, de l’avis général, il soit un gros bûcheur, M.
Sapin n’est pas de bois. Et certaines critiques, trop rongeuses, doivent lui
fendre le cœur : pour peu qu’on s’intéresse à l’homme, sous l’écorce. Que M.
Sapin travaille, certes, la chose n’est pas douteuse. M. Sapin travaille même
d’arrache-pied. Il est, pour dire les choses crûment, le ministre du Travail de la France,
et c’est là une tâche bien considérable, éreintante et ingrate qui l’attend,
chaque matin, au bureau de son ministère. Le boulot, en effet, de M. Sapin
consiste à plaire aux riches (dont M. Sapin fait partie), à toute heure, à
force d’attentions émouvantes et de soins réguliers, sans négliger de prévenir,
symétriquement, chez des pauvres écrasés de misère – et par ailleurs en nombre
dangereusement croissant – toute explosion de violence incontrôlable. Parler
aux uns, en somme, et puis aux autres, et les convaincre avec un égal succès
que le chemin économique – épineux – emprunté par M. Sapin est bien le seul
possible. Voilà quel est son travail. Une gageure, assurément, jugeront
certains esprits simplement incrédules. D’autant que la réputation de M. Sapin
– celle d’une grosse huile, guère apte à faire souche – l’aura toujours
précédé, véritable pierre dans son jardin. Il est régulièrement dit, entre
autres, de M. Sapin qu’il peut se montrer cassant, sinon rigide, en d’autres
termes que rien ne le freine sitôt bien définis par lui les divers
buts stratégiques à atteindre. On renvoie également M. Sapin à son train de
vie, flamboyant paraît-il. Et on le jure totalement coupé des réalités. Tout
cela n’est guère sérieux. Voudrait-on que M. Sapin travaillât pour des
prunes ? Au reste, il semble que cette mauvaise réputation se tasse un peu
dans l’opinion. Au vu de sondages récents, M. Sapin y semble avoir fait son
trou. Mais d’autres observateurs demeurent, à son égard, rigoureux et sévères.
Tartufferie ! persiflent immanquablement ceux-là à la seule mention de son
patronyme, et déjà l’emploi de ce vocabulaire typiquement années 1930 désigne
assez, chez eux, la prégnance de certaines tendances populistes évoquant les
heures les plus sombres de notre histoire. M. Sapin, cependant, n’est pas homme
à trembler. Car enfin, à qui entendrait-on faire croire que cette prétendue
hypocrisie politicienne, tellement stigmatisée par les temps qui courent,
constitue la racine véritable de l’action de M. Sapin ? M. Sapin – tout
entier – y trouverait son essence ? Nous convenons volontiers que dans la
branche de M. Sapin, dans sa branche d’activités, tout s’enchaîne dans le plus
grand mystère, que les bons résultats succèdent aux mauvais sans qu’on
comprenne toujours pourquoi, ni comment au juste – sur la question délicate,
par exemple, des fruits de la croissance. Mais, sans nous faire l’avocat de M.
Sapin, nous jugeons cependant que sa relative stérilité et
l’impuissance de M. Sapin à seulement peser, en bien ou en mal, sur toute cette
conjoncture imprévisible suffiraient amplement à définir sa position. En clair,
M. Sapin n’est pas pourri. Sans doute brûlerait-il même d’annoncer, en
personne, de bons chiffres à la télévision, un de ces jours prochains. Hélas
pour M. Sapin, le ver est dans la pomme : tout peut plier d’un moment à
l’autre. Cela résulte de la ramification nouvelle des marchés mondialisés, sans
parler de ce maquis juridique qui les entoure. Tel est le germe – fatal – du
chaos permanent que doit chaque jour affronter M. Sapin. Telle est
l’inquiétude, confinant certainement à l’angoisse, qui doit chaque jour
l’aiguillonner. La vie, pour M. Sapin, n’est pas toujours rose. Elle n’est pas
un bouquet de violettes. Et pourtant, en dépit de ce riche patrimoine dont on
le sait aujourd’hui détenteur (plusieurs centaines de bâtons, aux dires de
certaines feuilles), en dépit, donc, de ces quantités de blé et d’oseille
auquel il eût pu décider prudemment de se consacrer, jusqu’à la fin de ses
jours, cette vie, et cette carrière, M. Sapin les aura choisies. Oui, M. Sapin
aura choisi ce chemin de croix. On a le mont des oliviers qu’on peut, certes.
Tout de même, face aux difficultés, M. Sapin plie et ne rompt point, tout lui
paraît zéphir quand à d’autres, aquilon. On se sera trompé sur cet homme, de
prime abord. On l’aura bien sous-estimé. Il n’est pas né, celui qui enterrera
M. Sapin.
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Michel Sapin à l'adolescence |
Un texte entraînant pour débuter la journée, et un visage qui respire le sens de l'humour, que demander de plus ? Ah si.
RépondreSupprimerDites-nous, cher Moine, George a-t-il pris le maquis ? L'archivisme lexomanique est-il révolu ? Serions-nous au début de la fin ? Faut-il se munir ?
RépondreSupprimer"Serions-nous au début de la fin ?" demandez-vous, cher Marquis. Entendez-vous par là que ça sent le sapin ?
Joli tour de force, cher Moine bleu, celui d'éviter le trop évident : "Ça sent le sapin". (ce à quoi je n'ai quant à moi pas pu résister ! ;-) )
Vous frappez fort et juste contre les langues de bois avec votre style alerte : on en redemande.
RépondreSupprimerN'ayez crainte, chère Carole : le panégyrique de M. Moscovici arrive bientôt.
RépondreSupprimer" Mon beau sapin
RépondreSupprimerRoi des forêts
Que j'aime ta verdure.
Quand par l'hiver
Bois et guérêts
Sont dépouillés
De leurs attraits
Mon beau sapin
Roi des forêts
Tu gardes ta parure. "
SAPIN FORÊTVER !
Sapin est un pro de l'enterrement. Au lendemain de la mort de Djamal Chaar après qu'il se soit immolé par le feu devant un pôle emploi le 13 février dernier, il déclarait "Les règles ont été appliquées avec l’humanité qui convient ...".
RépondreSupprimerMichel SAPIN, socialiste : ça me fout les boules !
RépondreSupprimerNous vous reconnaissons bien là, Anonyme. Et nous nous souvenions fort bien, au moment de rédiger notre éloge ému, du premier souci qu'avait eu M. Sapin en se rendant sur les lieux de la tragédie : assurer de son soutien brûlant les RADIATEURS de Pôle-Emploi.
RépondreSupprimerÀ DJM de Cambrai, c'est votre étonnement qui nous étonne. Qu'attendiez-vous au juste d'un socialiste comme M. Sapin ? Qu'il fasse la greffe ?