samedi 9 mars 2013

Riche Belgique (3) : Les femmes sont-elles plus folles que les hommes ?


Voir l'épisode précédent ICI !


Comme tous les 9 mars, au lendemain de cette sinistre abomination que représente la Journée de la Femme, nous reprenons nos esprits, au souffle de quelque grande interrogation féministe de l’Histoire soigneusement occultée par le féminisme contemporain, c’est-à-dire celui des chefs d’entreprise en quête d’égalité. 
Nous vous parlions, l’an dernier, de la lutte des ouvrières de Herstal. 
En 2013, nous tenions à vous parler des folles. Des folles, oui. Des hystériques, des tarées, des qui bavent. Des qui, pour ces raisons, à force d’inquiéter ou de déranger, se voient toujours, en toute logique, copieusement enfermées par la norme des hommes, laquelle testera sur elles, dans ses asiles douillets, toutes sortes d’hypothèses et de thérapies cohérentes.
« Les femmes sont-elles plus folles que les hommes ? »
Ainsi pourrait-on présenter la problématique – que seul(e)s les plus délicat(e)s des trois sexes oseront juger outrancière – poursuivie depuis des mois par deux établissements méritant l’intérêt du côté de Namur, dans notre chère Belgique. L’admirable Musée Félicien Rops de la rue Fumal, d’abord, ouvrit le bal le 22 septembre dernier avec son exposition Pulsion[s] Hystériques ! que nous avons hélas manquée, attendu qu’elle se tenait jusqu’au 6 janvier 2013 (l’occasion, d’ailleurs, de reconnaître, avec amertume, qu’il s’agit là du deuxième événement important raté par nous au même endroit, après l’exceptionnelle rétrospective consacrée par ledit Musée Rops, au début de l’année passée, à Degouve de Nuncques, assurément l’un de nos peintres préférés). Bref, voilà comment étaient alors présentées les choses :  

« L’hystérie connaît autour de 1900 une véritable heure de gloire : ce mal mystérieux préoccupe plusieurs médecins dont le plus connu est Jean-Martin Charcot, neurologue à l’hôpital parisien de la Salpêtrière dès 1862. Le dessin et la photographie sont mis au service de la science pour documenter les symptômes spectaculaires de ces corps qui perdent le contrôle dans l’hypnose ou l’extase, libérés des contraintes de la raison. Pulsion[s] Hystériques ! présente conjointement iconographie médicale et arts plastiques pour montrer leur influence réciproque. »

Et le Musée Rops de citer, à l’appui de tout cela, quelques noms éveillant forcément la curiosité, tels que ceux de Delville, Kubin, Rops (of course), Bourgeois, Duchenne de Boulogne, Schiele, Spilliaert, etc. Tout cela devait être passionnant.Or, tout cela, c’est du passé.  
Rien n’est perdu, cependant. 
Demeurez sur la brèche. 
Car deux autres expositions, arborant des thèmes extrêmement voisins, restent visibles dans le secteur. La première – le croirez-vous ? – se tient au Musée Rops, de Namur. Pas possible, encore lui ! Elle s’intitule Loss of Control II, et fermera en principe ses portes le 5 mai 2013. Poursuivant son exploration de « la folie en art », Loss of Control deuxième du nom s’intéresse spécialement à la figure et au corps des femmes, hissés notamment par le surréalisme au rang de support principal d’une perte de contrôle planifiée, et systématique. De Dubuffet, et son questionnement sur l’art des malades mentaux, à la Nadja de Breton (qui finira internée), le regard y sera ainsi confronté au terrain d’élection, lieu de naissance, patrie originelle de pans entiers de la folie créatrice moderne : le corps féminin, plus précisément les corps féminins : « transformés, transfigurés, morcelés, déguisés. » 
La ville de Gand accueille quant à elle jusqu’au 26 mai 2013 l’exposition Femmes névrosées : deux siècles d’histoire entre des femmes et leurs psychiatres. Le Musée du Docteur Guislain – qui l’organise – avant de célébrer les artistes enfermait plutôt folles et fous, puisqu’il s’agit d’un ancien asile d’aliénés, dont la mansuétude et la bienveillance strictement scientifiques s’exercèrent conjointement au dix-neuvième siècle. Ci-dessous, sa description officielle : 

« Les femmes sont depuis toujours considérées comme plus névrosées que les hommes : elles souffraient plus souvent d’instabilité et de maladie mentale, elles étaient plus souvent tourmentées par des esprits et autres démons. En fait, sont-elles plus enclines aux « maladies de l’esprit » ? L’exposition présente sept « couples » patiente-psychiatre : un tableau remarquable de l’évolution de la société et de la psychiatrie, montrant comment certaines maladies mentales comme l’hystérie ont été liées à une époque, comment la nôtre  suscite et supporte de nouvelles formes de comportements perturbés. »

On notera l’étrangeté liminaire, presque comique, du balancement entre présent et imparfait, ainsi que la référence – non moins comique – à ces nouveaux « comportements perturbés » dont nous nous régalons, par avance, de l’exhibition glorieuse. C’est que les gantois sont de grands humoristes, de nature. Question de climat, sans doute. Charles Quint, entre autres rigolos, était gantois, non moins que George Minne ou Maurice Maeterlinck. Ce qui vous permettra, au sortir de la terrible cathédrale Saint-Bavon (comme une folle, justement !) d’enrichir le propos du célèbre chansonnier belge postulant autrefois cette oscillation typique, dans l’âme flamande, du « fusil au missel ». 
Une alternative bien réductrice.
Il est possible d’osciller, à Gand, entre missel et Asile. 
Nous croyons l’avoir démontré. 
Un joyeux 9 mars.


 

3 commentaires:

  1. Le musée Félicien Rops, l'abominable musée Félicien Rops, sinistre, où les tableaux sont mal éclairés, mal disposés, où l'on étouffe. Quand j'en suis sorti, j'ai pensé à cette phrase de Louis Scutenaire: "Pourquoi gaspiller des flammes pour brûler les musées ? ".
    J'ai pourtant fait une autre tentative, au Louvre, où je suis resté vingt minutes devant "La nef des fous", pendant que des fous expliquaient à d'autres fous la signification des tableaux disposés aux alentours.
    Non, décidément, visiter les musées, je préfère pas.

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    1. Je n'en attendais pas moins, Marquis, d'un sévère tel que vous. Êtes-vous bien sûr, néanmoins, de ne pas confondre avec le Musée du Roll Mops, qui lui se trouve à Ostende ?

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  2. Non, non, je vous assure, j'y suis allé, je me souviens de tout, ce fut une journée d'enfer. Et pourtant, Les sataniques de Félicien ne me quittent jamais.

    Quant au Louvre, ... une semaine passée dans la puanteur de Paris m'a rassasié à jamais !

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